Zoos, dérives et animaux « sauvages » !

Une nouvelle fois, le monde des zoos a été ébranlé par un scandale : l’exécution par trois balles dans la tête d’un rhinocéros blanc, braconné pour sa corne de 2 kg d’une valeur estimée à 30 000 €, en plein zoo de Thoiry début mars. Cet événement tragique, une première dans un zoo, pousse à nous interroger sur la légitimité et la prétendue nécessité de détenir encore aujourd’hui des animaux sauvages pour notre seul divertissement, au prix de leur bien-être et même au prix de leur vie. Les nombreuses dérives constatées ces derniers mois, en France, en Europe et dans le monde, ne font que remettre en cause l’existence de ces établissements.

Pour les zoos européens, leurs rôles et obligations sont définis par la directive « Zoo » datant de 1999, transcrite en droit français par l’arrêté du 25 mars 2004. Les dérives rapportées ça et là par la presse, montrent qu’à ce jour les zoos européens ne répondent pas à leurs obligations. Plutôt que d’assurer les rôles qui leur sont assignés, ces zoos sont devenus de véritables industries de spectacle, toujours plus centrés, pour durer, sur leur communication et leurs innovations que sur la sécurité des animaux et des visiteurs. Manque de moyens ou manque de volonté ?

Du papier au terrain : dans les coulisses des zoos !

Un problème dans la définition, le recensement et l’application des textes…

En France, le nombre d’établissements soumis aux dispositions de l’arrêté du 25 mars 2004 varie selon les sources. 300 zoos sont référencés par le ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer ; mais ils seraient 943 selon d’autres sources associatives. Une telle différence montre d’abord la difficulté à définir ce qu’est un zoo ; dès lors, il est complexe de les identifier sur notre territoire. Pourtant, en droit français, les zoos sont désignés et définis comme des « établissements zoologiques à caractère fixe et permanent, présentant au public des spécimens vivants de la faune locale ou étrangère, pendant au minimum sept jours par an » (article 1er de l’arrêté du 25 mars 2004). La définition donnée des jardins zoologiques par la directive est sensiblement la même. Un tel écart risque d’être gênant en cas de contrôle de la Commission européenne.

Ces écarts entre la directive et sa transcription dans la définition des zoos et dans leur recensement ont été constatés dans tous les États membres. Les estimations indiquent qu’il y aurait 3 500 zoos disposant d’une licence dans l’Union européenne. Or des centaines de zoos, répondant à la définition donnée par la directive, ne possèdent pas cette licence. Ils échappent donc aux obligations et aux contrôles. De plus, les États membres se révèlent incohérents dans l’application de la directive et très peu d’efforts ont été investis pour identifier et traiter ces questions. Alors que l’on rediscute cette directive en 2017, force est de constater qu’il est nécessaire de repartir à la source, de donner une définition et de fixer les rôles qui en découlent. En effet, sans une définition claire, sans un recensement efficient, l’application du texte ne pourra pas être homogène, ni entre les États membres, ni au sein d’un même territoire national.

Des failles en matière de sécurité…

« Les États membres adoptent les mesures afin de garantir que tous les jardins zoologiques mettent en œuvre les mesures de conservation suivantes : […] empêcher que les animaux ne s’échappent afin d’éviter d’éventuels dangers écologiques pour les espèces indigènes et empêcher l’introduction d’organismes nuisibles extérieurs. » (article 3 , directive Zoo)

Garantir la sécurité et prévenir les accidents font partie des obligations des zoos, clairement énoncées dans les chapitres I et II de l’arrêté de 2004 et dans l’article 3 de la directive. Cependant il s’agit d’obligation de moyens et non de résultats. En moyenne, dans l’Union européenne, un zoo sur cinq met le public en danger de blessure ou d’exposition à des maladies.

Alors que la plupart des oiseaux captifs en volière sont incapables de voler, leurs rémiges étant éjointées, « Guibole », un marabout d’Afrique, l’un des 400 oiseaux du spectacle « Les Maîtres des airs » du zoo de Beauval, a pris un bol d’air loin de sa volière. En 10 jours, l’oiseau a parcouru 600 km vers le sud. Retrouvé dans une réserve naturelle, mis sous sédatifs pour le retour, il a finalement réintégré sa volière. Des oiseaux de proie, des échassiers et des psittacidés sont régulièrement perdus, parfois pendant plusieurs jours, suite aux spectacles en « vol libre » de plus en plus proposés par les zoos. Tous ces oiseaux sont imprégnés et incapables de chasser pour se nourrir. C’est l’une des raisons pour lesquelles les zoos doivent concevoir leur parc selon des « caractéristiques [qui] leur permettent de prévenir les évasions des animaux hébergés » (article n° 2, arrêté du 25 mars 2004). En octobre 2016, « Kumbuka » un gorille dos argenté de 180 kg, a brisé la vitre de son enclos en se jetant dessus à plusieurs reprises. Il s’est ainsi offert 1 h 15 de liberté en plein cœur de Londres avant d’être retrouvé. En mars, au zoo Port Lympne en Angleterre, un guépard s’est échappé de la partie safari accessible en voiture et s’est frayé un chemin jusque dans la partie de la visite à pied du zoo. Il s’est ainsi offert une promenade d’une demi-heure avant d’être reconduit à sa cage. Pour le directeur « le guépard ne présentait pas de menace pour les visiteurs » ; mais toutes les tentatives de fuites ne connaissent pas la même fin. En mars encore, au zoo d’Osnabrück en Allemagne, un ours de 10 ans a brisé sa clôture. Pour protéger les 4 000 visiteurs, le service de sécurité a dû abattre l’animal.

Par ailleurs, les zoos français ont également du mal à assurer la sécurité de leurs animaux face au vol et désormais face au braconnage. Pourtant il est clairement stipulé à l’article 8 de l’arrêté du 25 mars 2004 que « la pénétration du public est interdite dans les bâtiments, locaux et allées de service […] » et que l’enceinte du zoo est construite telle que « les caractéristiques doivent permettre de prévenir les perturbations causées aux animaux par des personnes se trouvant à l’extérieur de l’établissement » (article n° 2, arrêté du 25 mars 2004). Cependant en mai 2015, 17 tamarins-lions dorés, 10 ouistitis argentés et 2 tortues d’Hermann ont été volés au zoo de Beauval, pour un préjudice financier estimé à 200 000 €. En septembre 2015, un capucin brun et un ouistiti à pinceaux blancs, espèces inscrites à l’annexe I de la CITES, ont disparu du zoo de la Barden, dans les Bouches-du-Rhône. En février, c’est un manchot de Humboldt d’un an, à l’alimentation particulière et dépendant de sa colonie, qui a été dérobé dans un zoo allemand. Aucun de ces animaux n’a été retrouvé à ce jour.

À ces larcins, de plus en plus fréquents et de plus en plus organisés s’ajoute maintenant un braconnage cruel en plein cœur de ces « arches de Noé ». Dans la nuit du 6 au 7 mars, des braconniers ont abattu, à l’aide d’un fusil de chasse, « Vince » un rhinocéros de 2 tonnes, de 3 balles dans la tête avant de couper et d’emporter la corne de l’animal. La dizaine d’enquêteurs de la brigade de recherche traite l’affaire « comme si c’était un meurtre humain ». Une information judiciaire a été ouverte par le parquet de Versailles, pour « des chefs d’association de malfaiteurs, détention d’espèces protégées, atteinte en bande organisée à la conservation d’une espèce animale, vol aggravé, recel en bande organisée et transport, détention, cession d’espèce non domestique » . En réponse à la menace, certains zoos ont annoncé qu’ils allaient installer des caméras de vidéosurveillance. Pourtant le zoo de Thoiry en était déjà équipé et cinq membres du personnel étaient également présents sur le site cette nuit-là. D’autres zoos n’iront pas chercher midi à quatorze heures, certains annoncent déjà leur intention de décorner leurs animaux à titre dissuasif : une « amputation » réalisée sous anesthésie, comme cela se pratique dans les réserves naturelles en Afrique du Sud et au Zimbabwe où le braconnage sévit quotidiennement. Chaque jour, 3 rhinocéros sont abattus dans le monde. En 1800, ils étaient un million, aujourd’hui leur population est estimée à moins de 30 000 individus, 70 % des survivants sont en Afrique du Sud.

Enfin, quand l’animal ne s’échappe pas de sa cage et quand le visiteur malveillant est mis à distance suffisante de lui, la menace peut provenir du ciel lui-même. Le Marineland d’Antibes, installé en zone inondable, en a fait la triste expérience en novembre 2011 et plus récemment en octobre 2015, lorsqu’une vague de 2 mètres est venue s’abattre sur « le plus grand parc animalier marin de France et d’Europe », détruisant 90 % des installations et bloquant les arrivées d’eau et d’électricité. L’orque Valentin et de nombreux animaux : tortues, raies, loups de mer, roussettes, poissons exotiques ainsi que des animaux de ferme ont péri ; le parc déplore la mort d’une centaine d’animaux due aux intempéries. La plupart d’entre eux aurait souffert d’hypothermie ou d’asphyxie par les hydrocarbures retrouvés dans les eaux boueuses des bassins, selon le directeur animalier du Marineland. Ce carnage était pourtant prévisible ; en effet cet établissement est installé en zone inondable. Certaines associations ont décidé de porter plainte pour « maltraitance animale involontaire », une enquête préliminaire a été ouverte ; l’association SOS Grand Bleu quant à elle a déposé une requête devant le préfet et le tribunal administratif de Nice demandant la suspension de l’autorisation d’ouverture de l’établissement au titre des installations classées pour la protection de l’environnement. Dans le même temps, 4 campings situés dans la même zone inondable ont été fermés au titre de la sécurité publique. Mais le Marineland y a échappé, alors qu’il est exposé aux mêmes risques et qu’il accueille plusieurs milliers de visiteurs chaque jour. Il semble qu’il y ait deux poids, deux mesures (Planète Mer n°  91). Un an après, les associations déploraient que les conséquences n’aient pas été tirées de la catastrophe.

Ainsi, quant à la définition d’un zoo, à la sécurité qui doit y être assurée, les derniers faits divers montrent que les zoos européens ont bien du mal à assumer leurs devoirs tant à l’égard du public que des animaux. Si les zoos ne respectent pas a minima les dispositions essentielles, comment pourrait-il honorer un prétendu rôle d’éducation et de « conservation » ?

Une exploitation commerciale du vivant

Bien que la directive confie aux zoos un rôle dans la conservation de la biodiversité et dans la diffusion d’informations pour promouvoir la protection et la conservation des espèces (article n° 3 – Exigences applicables aux jardins zoologiques, directive 1999/22/CE), ces établissements sont avant tout des entreprises commerciales qui se livrent une bataille économique afin de perdurer. Cette course à la rentabilité pousse la majorité des parcs à proposer chaque année des nouveautés, afin de faire revenir toujours plus de visiteurs. Chaque année, en France, 20 millions de curieux sillonnent les allées des zoos. Avec une entrée en moyenne à 22 € par adulte et 16 € par enfant, le chiffre d’affaires des zoos est estimé à 380 millions d’euros, rien que pour les entrées. Chaque établissement veut se tailler sa part du lion. Ainsi cette année, le zoo d’Amnéville se dote d’une nouvelle « Forêt des ours », le zoo de Beauval inaugure « La Terre des lions » et le zoo de Doué la Fontaine « Les fantômes de l’Himalaya ». Ces mises en scène, toujours plus spectaculaires les unes que les autres, coûtent cher aux établissements. Et chaque année les zoos oscillent entre agrandissement des enclos et diversification des espèces. Ainsi une savane de 5 300 m² est proposée aux éléphants pour un coût de 27 millions d’euros, 5 300 m² de savane sont proposés aux 6 lions de la Terre des lions, 7 millions d’euros ont été investis par le zoo de Beauval dans une dizaine de nouveautés. Plus l’enclos est vaste, plus les dépenses sont importantes. Cependant le dimensionnement ne tient jamais compte du bon sens qui est de prendre en compte les besoins des animaux captifs : pour eux, ces enclos tout neufs auront une superficie ou un volume infimes par rapport aux territoires de leurs congénères à l’état sauvage.

En parallèle de la diversification des espèces et de l’« agrandissement » des enclos, on observe également depuis quelques années une diversification de prestations proposées au public à l’image des hôtels « haut de gamme » qui se construisent maintenant en plein cœur des établissements. Ainsi le zoo de la Flèche s’est doté d’un « Safari lodge » : « Dans un cadre grandiose au cœur du Wild Artic, vivez un moment spectaculaire et unique au monde face aux géants du pôle Nord, depuis votre lodge XXL de 120 m2, vous admirez nos fabuleux ours polaires par de larges baies vitrées panoramiques ». Tout est mis en œuvre pour combler le confort des clients : « un immense salon magnifiquement décoré », « une suite parentale époustouflante avec vision sous-marine » et un « bain nordique/jacuzzi qui vous permettra de vous relaxer tout en admirant nos Géants de l’Arctique ». Une bienveillance très rentable pour les zoos puisque la nuit est proposée aux clients à 415 €.

En 2015, le zoo d’Amnéville inaugurait « Tigerworld », une attraction à 14 millions d’euros d’investissement accueillant 3 fois par jour jusqu’à 2 000 spectateurs venus voir un numéro de cirque effectué par 8 tigres, qui vivent le reste du temps dans des espaces minuscules. Au budget nouveauté s’ajoute toujours un budget communication y attenant. Plusieurs zoos se lancent ainsi dans d’immenses campagnes de publicité, parfois à plus de 10 000 € la semaine. Moins cher mais sûrement plus efficace pour attirer les curieux incrédules, les zoos invitent maintenant les télévisions à venir filmer leurs coulisses, à montrer comment vit et fonctionne l’établissement. Les zoos leaders du marché ont chacun choisi leur format et leurs chaînes de prédilection. Ainsi la série du zoo de la Flèche entame sa septième saison avec une audience moyenne de 440 000 téléspectateurs, de quoi garantir toujours plus d’entrées et vendre toujours plus de nuits d’hôtel. Avant et pendant la saison d’affluence du public, de nombreux reportages à heure de grande écoute sont proposés (6ter, 31/03/2017, Zone Interdite, M6, 19/02/2017). Aux affiches, aux télévisions s’ajoutent enfin les réseaux sociaux afin d’attirer, élargir et fidéliser la clientèle.

Un pourcentage précis du chiffre d’affaires devrait à minima être imposé et dédié uniquement au financement de programmes non pas de conservation-collection dans les zoos, mais de préservation des espèces et des espaces naturels dans lesquels ils évoluent encore à l’état sauvage.Les efforts et les sommes dépensés pour les nouveautés et la communication sont astronomiques, surtout si on les compare aux sommes allouées aux programmes de conservation dont les zoos aiment pourtant tant parler. Entre 2009 et 2015, le zoo de Beauval a soutenu 45 programmes de conservation pour un montant total de 1,54 million d’euros. Cette somme globale est dérisoire comparée aux 13 millions d’euros dépensés en 2015 rien que pour construire Les Pagodes de Beauval, leur nouvel hôtel construit et aménagé pour les touristes chinois (Le ZooParc de Beauval en chiffres, 07/2015). Pourtant, pour le directeur du zoo, président de Beauval Nature, l’association en charge de la partie conservation : « L’année 2015 a été une excellente année à tous les niveaux pour Beauval Nature, tant au niveau financier que pour ses activités ». L’ensemble des efforts consentis par le « 1er zoo de France » à la conservation, alors que la conservation fait partie du rôle du zoo (article n° 3 de la directive « Zoo »), n’est que de quelques pour cent par rapport au chiffre d’affaires annuel. Les directeurs des zoos expliqueront pour se justifier que faire tourner un zoo cela coûte cher ; quoi qu’il en soit les sommes investies dans les programmes de conservation sont bien minimes. Puisque les zoos qui pourraient se le permettre ne jouent pas le jeu, puisque seuls comptent la rentabilité et le profit, un pourcentage précis du chiffre d’affaires devrait à minima être imposé et dédié uniquement au financement de programmes non pas de conservation-collection dans les zoos, mais de préservation des espèces et des espaces naturels dans lesquels ils évoluent encore à l’état sauvage. Seuls ces programmes et leurs résultats pourront être décisifs pour tenter d’enrayer les disparitions prévisibles d’espèces.

Parmi les centaines de zoos recensés en France, tous n’ont pas la faveur des visiteurs ; seuls les gros établissements, moins d’une dizaine, savent attirer les projecteurs sur leur entreprise. À terme, de nombreux zoos sont amenés à disparaître, vaincus par la concurrence. Alors que le zoo de Saint-Thibéry dans l’Hérault est en liquidation judiciaire, dans le même temps le zoo de Montpellier voisin annonce 30 millions d’euros d’investissement. Tout comme les animaux en danger d’extinction qu’ils présentent, les zoos subissent eux aussi la dure loi de la nature, celle d’une nature contre nature.

« En cas de fermeture d’un jardin zoologique ou d’une partie du tel jardin, l’autorité compétente veille à ce que les animaux concernés soient traités ou déplacés dans des conditions que les États membres jugent appropriées et compatible avec les objectifs et les dispositions de la présente directive » (article 6, directive Zoo).

Quand les établissements ferment, les animaux doivent être replacés. Bien que la directive ait été transposée dans tous les États membres, les lois nationales sont souvent dépourvues de stratégie claire sur ce qu’il adviendra des animaux en cas de fermeture. Parfois, dans le cadre des programmes d’échanges européens d’espèces, des animaux sont transférés délibérément vers des zoos dont les problèmes financiers sont connus. Ainsi, durant l’été 2016, deux dauphins du Parc Astérix ont été transférés au zoo Attica Zoological Park en Grèce alors même que ce zoo connaît d’importantes difficultés financières, qu’il a été condamné à une amende de 1,5 million d’euros pour avoir ouvert sans autorisation son delphinarium et que les autorités grecques demandent à l’établissement de fermer ses bassins.

Les choix de développement des zoos, quand on les compare aux objectifs qu’ils doivent remplir, sont stupéfiants et incompréhensibles. Force est de constater avec les multiples faits divers que les choix semblent plus motivés par une envie de faire du quantitatif plutôt que du qualitatif.

Ailleurs dans le monde 

Ailleurs dans le monde, comme en Europe, les conditions de vie des animaux sont étroitement liées au contexte économique, politique et institutionnel des États dans lesquels ils sont implantés. De nombreux pays n’ont pas de législation encadrant les pratiques de leurs établissements. Dans les pays développés, la mode est à la diversification des animaux, dans d’autres régions les préoccupations sont bien différentes. Et la maltraitance animale est universelle et sévit quel que soit le pays. Au zoo de Hanovre en Allemagne, des images datées du 4 avril montrent comment à coup de « bulhook », tige à la pointe métallique, les éléphanteaux sont brutalisés lors de leur dressage. Quelques jours auparavant, au zoo de Tunis, 3 jeunes garçons de 5 à 8 ans sont entrés dans l’enclos des flamants rose pour leur jeter des pierres : l’un souffre d’une fracture à la patte, un autre a été retrouvé mort. Début mars, un crocodile a été lapidé au zoo de Tunis. Dénoncée par l’ambassadeur de France, cette mise à mort barbare n’a nullement été condamnée de la part du ministère tunisien en charge des zoos. Au Salvador, « Gustavito » un hippopotame de 15 ans a été passé à tabac en pleine nuit. L’animal, le corps couvert d’hématomes, la joue ouverte sur 15 cm a été découvert au petit matin. Il a succombé à ses blessures après une longue agonie. Les visiteurs eux-mêmes sont partagés entre le choc et l’incompréhension : « Ils ont tué un animal qui ne faisait que nous divertir ».

Dans les zones de conflits, les animaux des zoos subissent directement les conséquences d’être né ou d’avoir été capturé puis transporté au mauvais moment et au mauvais endroit. Au zoo de Gaza, « le pire zoo du monde », beaucoup d’animaux sont morts pendant les raids de 2007. Dix ans plus tard, le zoo s’est transformé en tombeau. 80 animaux ont été retrouvés momifiés, mort littéralement de faim dans leurs cages. Au zoo de Mossoul, seulement deux animaux ont été retrouvés vivants : un lion et un ours. Victimes collatérales des combats, ils avaient été abandonnés. Enfin au Venezuela, ce ne sont pas les conflits militaires mais la crise économique et institutionnelle qui a poussé les habitants à manger un cheval et un éléphant. Le rationnement pour la population est telle qu’elle atteint aussi le repas des animaux. Les fauves sont réduits à manger des fruits par manque de nourriture.

Cependant malgré toutes ces dérives et ces faits divers, certains pays s’honorent par leur conduite. La LFDA salue la décision exemplaire qui a été prise par une juge en Argentine en avril dernier (France Info, 07/04/2016). Suite à la mobilisation de l’association AFADA, Cécilia, une femelle chimpanzé a été libérée de son zoo, « elle a quitté sa prison après 19 ans de détention ». En 2013, également en Argentine, un autre grand singe avait été libéré de la prison en référence à l’Habeas corpus, le droit humain de ne pas être emprisonné sans jugement. Cependant, bien que ces singes ne soient plus « détenus » et présentés au public, il n’empêche que ces animaux ne pourront jamais retrouver leur milieu naturel : leur réhabilitation et leur réintroduction étant bien trop complexes.

Christelle Houvenaghel et Florian Sigronde Boubel

 Article publié dans le numéro 94 de la revue Droit Animal, Éthique & Sciences.

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