Non aux chasseurs dans les écoles!

(Extrait du n° 85 de la revue trimestrielle « Droit animal, éthique et sciences » : Le chasseur de base confirmé « éducateur » ?)

Au début du mois de février a été diffusée l’information suivante : la ministre de l’écologie et la ministre de l’éducation nationale envisagent de signer, avec les organisations regroupant chasseurs et pêcheurs, une convention les chargeant de l’éducation au respect de la nature et à la biodiversité dans les écoles. Ce n’a pas été une surprise, car cette délégation de mission éducative est l’aboutissement d’une stratégie engagée par les chasseurs et leurs parlementaires alliés dès 2005.

Nécessité d’accompagner et d’aider l’école dans son effort d’éducation

A l’ origine, le Grenelle de l’environnement a conclu notamment à « la nécessité d’accompagner et d’aider l’école dans son effort d’éducation » dans les domaines de la nature et de la biodiversité. Ces termes vagues ont fait naître quelques idées, et ont donné l’occasion d’ouvrir la voie. D’où la loi 2005-157 du 23 février 2005 précisait à son article 149 : «Par leurs actions de gestion et de régulation […] leurs réalisations en faveur des biotopes, les chasseurs contribuent à la gestion équilibrée des écosystèmes. Ils participent de ce fait au développement des activités économiques et écologiques […]»Ainsi, la loi a attribué à la chasse un rôle de régulation et de gestion, et a reconnu aux chasseurs celui de participer activement aux équilibres écologiques.

La loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 s’est occupée des fédérations départementales de chasse, en les rendant autonomes et en les chargeant des mêmes missions que la Fédération nationale et les fédération régionales (cf article 41). Obtenir d’entrer dans les établissements scolaires est devenu bien plus facile: au niveau du département, les relations locales peuvent aisément jouer, et encore plus facile au niveau de la commune, qui est le domaine des associations de chasse. En somme, n’importe quel chasseur du coin, obligatoirement affilié à l’association de chasse, pourrait aller prêcher la mauvaise parole à l’école. Le 10 janvier 2014, le ministre de l’écologie Philippe Martin a signé l’arrêté «portant renouvellement de l’agrément de protection de l’environnement de l’association Fédération nationale des chasseurs pour une période de cinq ans.»

Convertir les enfants afin d’assurer la relève

Avec ce dernier coup de pouce, l’arsenal législatif, ou plutôt le râtelier des armes législatives, a été bien mis au point. Il résulte d’une stratégie concertée, d’un programme bien étudié dont le but caché, mais réel, est de convertir les enfants à la nécessité et aux bienfaits de la chasse, afin d’assurer la relève, c’est-à-dire sa survie. Car année après année, les craintes grandissent qu’elle disparaisse. La désaffection des jeunes est patente : 5 % des chasseurs ont moins de 25 ans (alors que les moins de 25 ans totalisent 32 % de la population selon l’INSEE 2014!), et 64 % des chasseurs ont de 45 à 74 ans…

Lors d’un «déjeuner de travail» organisé le 28 janvier au ministère de l’écologie avec Bernard Baudin, président de la FNC, Mme Ségolène Royal a «confirmé qu’elle soutenait la convention sur l’éducation à la nature et qu’une signature commune avec la ministre de l’éducation nationale aurait lieu en février 2015». Il faut consulter le site internet passionlachasse pour y lire l’éventail large et très instructif des demandes (des exigences…) du président de la FNC et les réponses favorables de la ministre.

Collectif «NON aux chasseurs dans les écoles!»

La réaction a vite suivi : le 12 février 2015, le collectif «NON aux chasseurs dans les écoles!» rassemble 65 organisations vouées à la défense de l’animal et à la préservation de la nature (parmi lesquelles la LFDA) et envoie un courrier à la ministre de l’écologie et à la ministre de l’éducation nationale (télécharger la lettre du collectif ici ou sur le site de l’ASPAS). Ce courrier dénonce et prouve le prosélytisme pro chasse illégal effectué par les chasseurs auprès des enfants, l’enseignement biaisé par la dénonciation des méfaits des «nuisibles». Il fait référence à l’avis du Conseil économique, social et environnemental de décembre 2013, qui déclarait : «La découverte du monde vivant, de la nécessaire empathie avec les autres êtres vivants, constitue un maillon essentiel de l’éducation première». Les 65 signataires soulignent le rôle que devraient jouer, à l’opposé des chasseurs, les organismes spécialisés regroupés dans le CFEEDD – Collectif français pour l’éducation à l’environnement vers un développement durable, ou le Réseau Ecole et Nature. Le courrier demande aux ministres de ne pas cautionner l’intervention des chasseurs en milieu scolaire en signant une telle convention. Leurs réponses sont impatiemment attendues. Quelles qu’elles soient, préserver et respecter la nature demeure incompatible avec le fait d’y détruire les animaux qui y vivent. Même habillé de vert, le « chasseur-protecteur » ne fait pas illusion, pas plus que « Le loup devenu berger », vêtu de son hoqueton. L’habit ne fait pas le moine. Et le fusil n’est pas une houlette.

Pr JC Nouët

Vice-président de la Fondation LFDA

 

En lire plus sur le site de l’ASPAS

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