Le foie gras, une gourmandise au prix de la souffrance

Collection « 10 questions pour mieux comprendre la condition animale », livret #1, 28 pages, édition LFDA (2e éd.), 2019

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Chaque année en France, plus de 20 millions de canards et d’oies sont suralimentés par ingestion forcée (gavage) afin que leur foie devienne un foie gras en accumulant en masse des graisses. Pour  que chacun connaisse les réalités scientifiques, techniques et juridiques de la production du foie gras et choisisse sa conduite éthique en toute connaissance de cause, la LFDA  vient de rééditer son livret « Le foie gras, une gourmandise au prix de la souffrance » d’une nouvelle collection « 10 questions pour mieux comprendre la condition animale ».

En s’appuyant notamment  sur le rapport du Comité scientifique de la santé et du bien-être animal de la Commission européenne  sur la protection des palmipèdes à foie gras du 16/12/1998 et sur plusieurs textes réglementaires français et européens concernant la protection des animaux dans les élevages, ce livret répond avec précision et concision à dix questions majeures.

Lire l’analyse critique de la LFDA sur le rapport du Comité scientifique.

Ce livret, accessible au plus large public permettra à chacun, ainsi éclairé, en fonction de ses convictions morales, d’ajuster sa conduite de consommateur ou éventuellement de producteur, voire  d’électeur, et de continuer ou non à acheter, offrir, consommer, commercialiser du foie gras ou à soutenir ou non par ses votes des programmes politiques en faveur du développement de cette industrie.

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1.Qu’est-ce que le foie gras ?

Le Code rural le définit comme « le foie d’un canard ou d’une oie spécialement engraissé par gavage » (article L654-27-1). Gaver signifie faire manger de force et abondamment une volaille pour l’engraisser.

Le foie gras est vendu sous diverses formes : foie gras entier, foie gras, bloc de foie gras, foie gras en conserve et foie gras cru. Il existe également des préparations à base de foie gras.

2.De quels animaux le foie est-il utilisé ?

En France, les canards représentent 98,5 % des palmipèdes élevés pour leur foie. Ce sont des canards mulards, issus du croisement entre une cane domestique et un canard de Barbarie mâle. Les oies représente 1,5 % des palmipèdes élevés pour la production de foie gras en France.

3.Où sont situés les élevages de palmipèdes pour produire le foie gras ?

La France est le principal producteur de foie gras (64 %), suivie de loin par la Hongrie (17 %) et la Bulgarie (12 %).

Environ 4 800 exploitations sont réparties dans les principales régions françaises productrices de foie gras : la Nouvelle-Aquitaine et l’Occitanie pour 72 % de la production, la Bretagne et les Pays de la Loire pour 26 % et la région Grand-Est pour 2 %.

4.Quelle quantité de foie gras est produite et consommée ?

En 2017, 18 400 tonnes de foie gras ont été produites mondialement, dont 11 630 tonnes en France, soit 23,7 millions de canards et 150 000 oies. En raison d’une épidémie d’influenza aviaire, la production française a baissé de 40 % entre 2015 et 2017. La France exporte son foie gras principalement vers l’Espagne et la Belgique. En 2017, elle a importé 3 750 tonnes de foie gras, principalement de Hongrie et Bulgarie.

En 2014, la consommation de foie gras en France était de 276 g par habitant et par an en moyenne, en recul par rapport à 2010 (300 g). En 2017, la France représentait 70 % de la consommation mondiale.

Le foie gras provient uniquement de canards mâles. Les cannetons femelles sont éliminées peu après l’éclosion par broyage, asphyxie ou gazage car leur foie n’est pas de qualité suffisante.

5.Pourquoi et comment les palmipèdes sont-ils gavés ?

Selon les producteurs de foie gras, le gavage reproduit un comportement naturel car les espèces utilisées seraient migratrices et feraient donc naturellement des réserves. Cependant, les espèces de canards utilisés ne migrent pas. Quant aux oies domestiques, qui pourraient migrer, leur foie après engraissement aurait tout au plus doublé de volume, alors qu’il peut être multiplié par 10 avec le gavage.

De plus, chez les oiseaux migrateurs, l’énergie nécessaire à la migration est accumulée sous forme de graisse, surtout au niveau du sternum, autour du foie et des viscères et en très faible quantité. Une surcharge dans le foie déstabiliserait l’oiseau en vol.

Pendant les 4 premières semaines d’élevage, les canards ont de la nourriture disponible en continu. Ensuite, pendant environ 8 semaines, les rations sont progressivement fragmentées puis augmentées dans la dernière semaine. Enfin, la phase de gavage dure entre 12 et 15 jours avant l’abattage. Une préparation à base de maïs est introduite sous pression dans l’œsophage à l’aide d’un tube 2 fois par jour. La quantité d’aliment augmente progressivement, jusqu’à ce que le foie du canard pèse 7 à 10 fois plus qu’un foie sain. Pour les oies, la technique est similaire.

6.Le gavage est-il source de souffrances ?

Un rapport du Comité scientifique de la santé et du bien-être animal sur la protection des palmipèdes à foie gras publié par la Commission européenne en 1998 reconnaît que le gavage n’est pas un mode d’alimentation normal pour les palmipèdes gras. Il indique que l’augmentation de la taille du foie empêche l’oiseau de se déplacer correctement et que le gavage serait source de douleurs à l’œsophage. Il mentionne également des lésions du sternum et des fractures des os.

En outre, le taux de mortalité augmente avec l’engraissement du foie (entre 2% et 5%, bien supérieur à celui dans les élevages de canards non utilisés pour la production de foie gras), principalement à cause d’insuffisances et maladies respiratoires, de myopathie cardiaque, de problèmes intestinaux et d’hémorragies du foie.

Le foie gras est par définition un foie atteint d’une stéatose pathologique. Il s’agit d’une accumulation de graisses dans les cellules du foie. Il est possible qu’une stéatose régresse, mais malgré cette réversibilité, les cellules du foie sont gravement endommagées au cours du gavage. Si celui-ci est prolongé, une cirrhose irréversible se développe.

7.Les conditions d’élevage des palmipèdes gras sont-elles compatibles avec leur bien-être ?

Selon l’ANSES, le bien-être d’un animal implique un état mental et physique positif, qui est lié à la satisfaction des besoins naturels. Cet état est subjectif.

Avant d’être gavés, les palmipèdes sont hébergés en bâtiment, en théorie avec un accès à l’extérieur. Pendant la phase de gavage, les canards sont placés dans des cages collectives contenant minimum 3 individus.

Le Pr Donald Broom a listé dans un rapport de 2015 les atteintes au bien-être des canards gras : réactions de peur à l’égard des humains, forte densité des animaux, absence d’accès à un point d’eau pour le bain, absence d’accès à une litière, sol en caillebotis ou treillis métallique, procédure du gavage en elle-même, et la stéatose hépatique qu’elle entraîne.

Les animaux sont frustrés de ne pas pouvoir effectuer de comportements naturels, tel que plonger la tête sous l’eau. Le gavage les stresse. Nombre d’entre eux sont blessés aux pattes ou aux ailes. Les canards gras sont également débecqués (section de la pointe du bec) et dégriffés.

8.La production de foie gras est-elle conforme au droit français et européen ?

Les conditions d’élevage et de gavage des palmipèdes à foie gras ne sont pas conformes aux législations françaises* et européennes* car elles disposent qu’une méthode d’élevage ne doit pas entraîner des souffrances et doit respecter les impératifs biologiques des animaux.

Si la controverse persiste, c’est parce que reconnaître que le gavage est un acte de maltraitance le rendrait illégal.

* Convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages (1976) ; Directive 98/58/CE du Conseil du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages ; Article L214-1 du code rural et de la pêche maritime ; article 1 de L’arrêté du 30 mars 2000 modifiant l’arrêté du 25 octobre 1982 relatif à l’élevage, à la garde et à la détention des animaux ; articles R654-1 et 521-1 du code pénal ; Arrêté du 21 avril 2015 établissant des normes minimales relatives à l’hébergement des palmipèdes destinés à la production de foie gras.

9.Le gavage est-il autorisé à l’étranger ?

Vingt pays de l’Union européenne ont interdit le gavage, ainsi que la Flandre et la région de Bruxelles en Belgique. Seuls quatre le pratiquent encore (France, Espagne, Hongrie, Bulgarie, ainsi que la Wallonie).

Le gavage est également interdit ailleurs, dans d’autres pays d’Europe (Norvège, Suisse, Bosnie-Herzégovine, Islande, Macédoine, Monténégro, Serbie) et du monde (Israël, Turquie, Argentine). L’Inde et la Californie ont interdit la production et l’importation de foie gras.

10.Consommer du foie gras est-il conforme à l’éthique ?

L’être humain a le devoir moral de garantir le bien-être des animaux qu’il a domestiqués. Pourtant, le gavage et les conditions d’élevage des palmipèdes à foie gras ne respectent pas leur bien-être. Dans ces conditions, la consommation de foie gras n’est pas éthique. De plus, la tradition et la situation socio-économique ne doivent pas être un frein au progrès moral et sociétal.

Aucun label de qualité ne garantit un foie gras obtenu sans souffrance. Plusieurs alternatives s’offrent alors au consommateur :

  • ne pas consommer de foie gras,
  • acheter des produits à base de foie issus d’animaux qui n’ont pas été gavés (pratique peu développée pour l’instant),
  • consommer des produits végétaux ressemblant au foie gras, tel que le « Faux gras© » de l’association belge GAIA, que l’on peut trouver en magasin bio. D’autres marques françaises fabriquent des produits végétaux imitation foie gras.

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