Expérimentation animale : explication du nouveau décret

Le 19 mars 2020, le Journal Officiel publiait le décret n° 2020-274 du 17 mars 2020 modifiant certaines dispositions relatives à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques. Les modifications qu’il apporte ont récemment fait l’objet d’une polémique. La LFDA souhaite revenir sur certains points sujet à interprétation et pouvant faire débat.

Souris blanche

Le décret n° 2020-274 du 17 mars 2020 modifiant certaines dispositions relatives à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques apporte des améliorations dans la transposition de la directive européenne sur la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques. En effet, la directive européenne a été transposée dans le droit français par un décret et des arrêtés datant de 2013. Ces textes juridiques comportaient quelques lacunes comme un nombre de représentants de la protection animale inférieur aux autres représentants au sein de la Commission nationale de l’expérimentation animale (CNEA), ou encore la précision des termes « projets ou procédures expérimentales » au lieu de seulement « procédures », comme indiquée dans la directive.

Augmentation du nombre de représentants de la protection animale

La Commission nationale de l’expérimentation animale (CNEA), créée en 1987, veille à la bonne application de la réglementation en matière de protection des animaux utilisés en expérimentation. Parmi les représentants des ministères concernés, de la recherche publique, du secteur industriel privé et de l’expérimentation animale, on dénombrait seulement trois représentants de la protection animale et de la nature dont le Pr Jean-Claude Nouët, fondateur et président d’honneur de la LFDA. En 2016, il alerte par un courrier au ministre de l’Agriculture M. Stéphane Le Foll et au secrétaire d’État chargé de la recherche M. Thierry Mandon de ce déséquilibre. Après quatre longues années de revendications, le décret n° 2020-274 du 17 mars 2020 vient rétablir l’équilibre au sein de la CNEA et double le nombre de représentants de la protection animale.

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Suppression de deux justifications aux dérogations

Une autre modification concerne les dérogations à l’obligation d’utiliser des animaux provenant d’élevages spécialement agréés pour la production d’animaux pour l’expérimentation animale. Cet agrément donne des garanties supplémentaires sur l’élevage des animaux dans ce but, notamment la présence d’une personne chargée spécialement du bien-être des animaux. C’est cette modification qui est à l’origine de la polémique.
La modification autorise l’utilisation d’un animal provenant d’un élevage non agréé à cette fin, à la condition « d’éléments scientifiques dûment justifiés ». Avant ce décret, cette condition était déjà présente, mais deux autres conditions alternatives existaient et ont été retirées :

  • lorsque la production des éleveurs agréés est insuffisante (pas assez d’animaux élevé à fournir par rapport à la demande) ;
  • lorsque la production des éleveurs agréés ne convient pas aux besoins spécifiques du projet (les animaux de ces élevages présentent des spécificités qui ne conviennent pas pour tel projet de recherche).

Certaines associations considèrent que le retrait de ces deux conditions facilite l’utilisation d’animaux ne provenant pas d’élevages spécifiques à l’expérimentation animale. Nous respectons cette analyse mais nous en avons une différente.

Nous estimons que le retrait de ces deux conditions restreint la possibilité d’utiliser des animaux provenant d’élevages non agréés pour l’expérimentation animale. En effet, nous considérons que les trois conditions (justification scientifique, production insuffisante et besoin spécifique) n’étaient pas cumulatives mais alternatives. Désormais, la justification scientifique constitue la seule raison valable. Dans le cas où elle ne serait pas recevable, les raisons d’une production insuffisante ou d’un besoin spécifique ne peuvent pas être acceptées comme justification pour recourir à des animaux issus d’élevages non agréés pour la recherche.

Nous précisons également que cela ne concerne pas seulement les chiens mais toutes les espèces animales pouvant être utilisées en expérimentation animale (les vertébrés et les céphalopodes).

Conclusion

La question écrite au gouvernement du député Loïc Dombreval permettra peut-être d’éclaircir la situation autour de cette polémique. En attendant, nous nous félicitons de l’augmentation du nombre de représentants de la protection animale au sein de la CNEA, qui devient d’ailleurs, par ce décret, Commission nationale pour la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques.


Nous tenons à rappeler l’engagement de la LFDA sur le sujet de l’expérimentation animale. Elle encourage les méthodes d’expérimentation alternatives et souhaite la fin de l’utilisation des animaux pour la recherche et l’enseignement, quand cela sera possible. En 1984, la LFDA a créé le Prix de biologie Alfred Kastler pour soutenir la recherche et l’application de méthodes évitant l’utilisation expérimentale traumatisante de l’animal. Tous les deux ans environ, un montant de 4000€ est reversé à un chercheur, enseignant, biologiste, médecin, pharmacien, vétérinaire ou agronome français développant des méthodes de remplacement de l’animal en expérimentation.

 

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