Visite scolaire à l’animal sauvage en captivité

Tout en reconnaissant au spectacle du cirque ou à la visite du zoo un rôle qui sans être culturel peut être attractif, La Fondation Droit Animal, Éthique et Sciences (LFDA) émet de graves objections à l’utilisation de l’animal sauvage, portant sur les points principaux suivants.

Cet article est un résumé d’une table ronde qui s’est tenue le 27 février 19801.

Les justifications de ces utilisations sont de divers ordres et toutes contestables

Le rôle éducatif est évidemment nul, puisque le comportement animal est totalement modifié, altéré et artificiel. De même le rôle récréatif, le spectacle d’un animal captif et au pire dressé est une aberration pédagogique, antithèse de l’enseignement du respect de la vie qui figure dans les programmes scolaires. En aucune façon ni le cirque, ni la ménagerie ne sauraient être les ambassadeurs du monde sauvage après des enfants.

En aucune façon la détention d’animaux sauvages ne peut contribuer à la sauvegarde des espèces : bien au contraire, en raison même des captures et de la mortalité (on estime généralement que 9 animaux sur 10 périssent de leur privation de liberté), la captivité reste un facteur important de la raréfaction des espèces et de leurs effectifs, notamment des anthropomorphes. De plus, les reproductions dans les zoos et ménageries se faisant au sein d’effectifs réduits, elles sont soumises aux lois de la génétique qui déterminent dans ce cas des dérives génétiques importantes.

La liste des animaux détenus dans les zoos est longue

Les établissements cherchant encore, pour la plupart, à constituer des collections riches et variées ainsi qu’au siècle précédent, souvent sans chercher à constituer des couples ou des groupes sociaux. L’esprit de “collection” va même jusqu’à rechercher l’animal rare, jugé capable d’attiser la curiosité du public.

Les animaux du spectacle (de piste pour le cirque) sont moins nombreux : en dehors des animaux souvent présentés, lion, tigre, panthère, puma, éléphant d’Asie, ours, chimpanzé, perroquet, chien, cheval, on trouve loup, babouin, otarie, manchot, boa, python, crocodile, caïman, hippopotame, zèbre, dauphin, requin, autruche, poule, dromadaire, lama, bœuf, chèvre, porc, lapin…

La liste des animaux de ménagerie est longue et variée : elle va des grands animaux à ceux de petite taille, aux reptiles, oiseaux, poissons, y compris à certaines espèces protégées par la loi (rapaces notamment).

La cohabitation permanente et la promiscuité d’espèces variées perturbent les rythmes biologiques et stressent les animaux (odeurs, bruits).

L’approvisionnement en animaux

Destiné à couvrir la mortalité ou à augmenter les effectifs, se fait soit par échanges ou ventes entre établissements, soit par importation officiellement autorisée (dérogations ministérielles), soit encore par les filières clandestines illégales, régulièrement dénoncées, parfois découvertes. Quelques animaux naissent en captivité, mais beaucoup d’animaux nouveaux auront été capturés dans la nature, au mépris de leurs droits à la liberté.

La détention des animaux

Pour inconfortable qu’elle soit souvent dans les établissements fixes, est déplorable dans les établissements mobiles. Les animaux de cirque et de ménagerie voyagent et demeurent dans des cages ou des “sabots’” minuscules ne leur permettant souvent aucun mouvement. Les animaux ne participant pas au voyage demeurent pendant la saison d’été sans exercice aucun, sous surveillance et soins réduits. Les conditions de la détention sont le plus souvent incompatibles avec les nécessités de l’espèce : cage de verre, double fond réfrigéré pour les reptiles, obscurité totale ou éclairage intense, muselage.

Acte est pris de la différence entre la misère physiologique des animaux détenus dans les petits cirques et les ménageries itinérantes, véritables prolétaires du spectacle, et les soins (relatifs) de nourriture et de litière que seuls peuvent donner quelques établissements à budget suffisant.

Les conditions de détention dans les zoos sont encore généralement peu satisfaisantes, surtout quant aux espaces et aux aménagements.

La capture, la déportation, la captivité prolongée, le dressage

Ils sont affirmés comme étant des atteintes directes à la physiologie et au psychisme de l’animal. Le dressage est une atteinte particulièrement grave, puisqu’il est imposé, par la contrainte, un comportement inadapté aux besoins et aux caractéristiques biologiques de l’animal. La LFDA condamne cette contrainte qu’elle soit exercée par la punition, ou par la récompense.

Malgré les déclarations des “dompteurs”, le dressage, transmis par tradition, ne se fait nullement pour “développer les possibilités naturelles”, et en “respectant les limites de sa physiologie”. Le démontrent amplement les singes fumeurs, les ours montés sur échasses ou sur patins, les éléphants équilibristes, ou les tigres écuyers… Au contraire, et certains dompteurs ont l’honnêteté de le reconnaître, il s’agit de “faire exécuter par l’animal ce qu’il ne pourrait jamais faire dans la nature”, en recherchant l’originalité.

L’animal captif

Dressé, transporté, subit nécessairement des altérations profondes et graves : comportement anormal, maladie de carence, stress. La LFDA affirme que certains établissements font procéder à l’exérèse des griffes et/ou des crocs.

L’information scientifique

Les renseignements pédagogiques relatifs aux animaux présentés sont généralement absents, ou très fragmentaires, ou erronés, dans l’ensemble des établissements “zoologiques” de France ouverts au public.

Les ménageries ambulantes et les “zoos scolaires”

Ils ont été longuement examinés. Ces établissements, souvent anciens petits cirques recyclés, présentent des animaux d’espèces diverses, détenus dans des conditions inadmissibles : l’exiguïté, le manque de soins, d’hygiène, de nourriture sont à l’origine d’une mortalité importante, estimée à 60 % de l’effectif par saison. L’entrée est payante.

Se prévalant abusivement d’une “licence ministérielle” (dont l’existence est niée par le ministère de l’Éducation nationale), ils obtiennent des Inspections d’Académie l’autorisation de pénétrer dans les écoles ; si cette autorisation est refusée, le camion cage stationne alors à proximité…

Le rôle pédagogique des “zoos scolaires”, des ménageries ambulantes, des exhibitions de reptiles, est rigoureusement nul, et même négatif. La présence d’animaux vivants captifs dans l’école remet en question les principes de l’éducation en matière de biologie. Ces montreurs d’animaux présentent en effet des spécimens d’une faune n’appartenant pas à nos climats ; les animaux sont traumatisés, leur comportement est totalement anormal, ils sont agressifs et malades, proviennent de trafics plus ou moins licites. Leur détention se fait dans des conditions sanitaires et des conditions de sécurité si déplorables, qu’il existe un danger traumatique et infectieux pour les enfants.

Encore une fois, l’exhibition de la captivité est la négation même de l’éducation au respect de la Vie. De plus, l’identification des espèces, et la description des mœurs sont toujours sommaires, très souvent erronées. Les questions des élèves ne reçoivent aucune réponse. Ce sont là des établissements à but strictement lucratif.

À la suite de nombreuses protestations auprès du ministère de l’Éducation, une circulaire signée le 6 août 1975 recommandait déjà de “n’accorder d’autorisation de ce genre que lorsque toutes les conditions paraîtront réunies pour que les élèves tirent réellement un profit du spectacle”. Cette circulaire semble dans plusieurs cas n’être parvenue dans les écoles qu’en mars 1979.

Une autre instruction ministérielle du 9 mars 1978 indique que l’autorisation peut être accordée par le directeur de l’école “après consultation, ou sur proposition des enseignants, et éventuellement du conseil d’école”.

Rappelons que le directeur de l’école a toute faculté de refuser l’entrée de son établissement, même si l’autorisation académique a été accordée. L’attention du Ministère de l’Éducation ayant été attirée sur cette question, la Direction de la Programmation et de la Coordination a fait parvenir aux Recteurs d’Académies une note de service datée du 10 mars 1981, et dissuadant d’autoriser les visites de ménageries ambulantes, répondant ainsi aux démarches effectuées par la Fondation Droit Animal.

La réglementation en vigueur

Elle vise tous les établissements présentant des animaux vivants, zoos, cirques, ménageries, aquariums, etc. Pour exercer  leurs activités, ces établissements doivent être en règle avec le décret 77-1297 du 25 novembre 1977 : déclaration en préfecture, mise en conformité des installations, détention d’un certificat de capacité et d’un certificat d’agrément. Les établissements doivent se conformer au décret 77-1296 du 25 novembre 1977 (autorisation de détention, d’utilisation et de transport ou d’importation des espèces protégées sur le territoire) et se conformer à la réglementation prise en application des conventions internationales sur la protection de la faune. Ils doivent enfin respecter les règles de fonctionnement et de contrôle qui leur sont imposées par les arrêtés du 21 août 1978 (concernant notamment les tailles des enclos, les protections de sécurité).

La Fondation Droit Animal, Éthique et Sciences (LFDA) constate et déplore un manque certain d’efficacité et un manque de moyens de contrôle de la part de l’Administration qui tolère que cirques, ménageries ambulantes et autres établissements de ce type se soustraient à la réglementation en vigueur. Elle est en mesure d’affirmer qu’aucun cirque, aucune ménagerie fixe ou itinérante, aucun delphinarium (à l’exception d’un seul) n’est en règle vis à vis des décrets de 1977 et des arrêtés de 1978. Elle note que la majorité des parcs zoologiques français ne disposent pas d’équipements conformes aux normes de sécurité et de protection du public, faisant ainsi courir aux visiteurs et particulièrement aux enfants des risques graves d’accidents invalidants ou mortels.

La Fondation Droit Animal, Éthique et Sciences (LFDA) déplore que, bien qu’alerté à plusieurs reprises, le Ministère de l’Éducation laisse les zoos scolaires se prévaloir d’une “licence  ministérielle” qui est un abus de confiance. Elle déplore enfin que les Préfectures ne prennent que peu souvent des sanctions à l’encontre des établissements, dont on sait qu’ils ne se conforment pas à la réglementation.

La Fondation Droit Animal, Éthique et Sciences note dans le dossier “Le Cirque”, édité par le ministère de la Culture et de la Communication en 1978 le passage suivant :
“Au goût pour l’exotisme se sont substitués chez beaucoup la passion de l’écologie ainsi qu’un souci moralisateur dans le comportement à l’égard des espèces animales. Cette évolution de la sensibilité, qui a toutes les chances de se maintenir comme valeur permanente de la civilisation contemporaine pourrait poser des problèmes graves : les responsables de ménagerie doivent être tout à fait conscients de l’ampleur du phénomène. Cela ne signifie certes pas que l’animal soit appelé à disparaître du cirque, bien au contraire ; mais le choix des espèces, leurs conditions de vie et de présentation doivent faire l’objet d’une réflexion approfondie”.

CONCLUSIONS

La Fondation Droit Animal, Éthique et Sciences (LFDA) ne peut que conseiller aux enseignants de délaisser les visites scolaires des zoos, des cirques, des ménageries, qui ne peuvent contribuer ni à l’instruction, ni à l’éducation des enfants. Les enfants ne peuvent se faire là qu’une idée erronée de la biologie des animaux présentés. Elle leur recommande, par contre, de préférer pour les sorties avec leurs élèves, les visites des parcs de vision, des parcs naturels, ou des fermes urbaines pédagogiques.

 Article tiré du dossier L’Animal et l’école (1989)

  1. Participants :
    Madame Suzanne FLON, artiste dramatique, membre de la LFDA
    M. Th. AUFFRET van der KEMP, biologiste, secrétaire adjoint de la LFDA
    M. J.J. BARLOY, docteur es sciences, écrivain et correspondant
    Me P. BISSON, conseil juridique, membre de la LFDA
    M. M. DUMONT, membre de la LFDA
    M. G. FRIEDENKRAFT, écrivain
    M. R. GAUTRON, enseignant, S.E.P.N.B., correspondant
    Pr G. HEUSE, président de la Ligue Internationale des Droits de l’Animal
    Pr J.C. NOUËT, biologiste, secrétaire général de la LFDA
    Dr G. SCHLESINGER, membre de la LFDA ↩︎

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