Loi agriculture et alimentation: où en est-on?

Dans le n° 98 de la revue, nos lecteurs ont pu lire un compte-rendu du passage du projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable présenté à l’Assemblée nationale (cf. article « Projet de loi EGA et respect du bien-être animal »).

loi agriculture et alimentation, Sénat
Hémicycle du Sénat, (Wikimedia Commons)

Cet article rappelait les mesures adoptées en première lecture par les députés : les trois premières étant prévues par le projet de loi du gouvernement, et le reste constitué des amendements retenus :

  • L’extension du délit de maltraitance animale aux établissements d’abattage et de transport ;
  • le doublement des peines pour maltraitances animales par les professionnels ;
  • la possibilité pour les organisations de défense des animaux de se porter partie civile ;
  • la généralisation des « responsables protection animale » à tous les abattoirs ;
  • le renforcement des dispositions relatives aux lanceurs d’alertes dans les abattoirs ;
  • l’intégration de la sensibilisation au bien-être animal dans les missions de l’enseignement et de la formation aux métiers de l’agriculture ;
  • l’expérimentation pour une durée de quatre ans des dispositifs d’abattoirs mobiles ;
  • l’interdiction de la construction de nouveaux élevages de poules en cages et de la rénovation des élevages de poules en cage déjà existants ;
  • l’obligation d’étiquetage du mode de production.

Ces mesures sont bien maigres pour améliorer réellement la condition des animaux d’élevage. Pourtant, de nombreux amendements dans ce sens avaient été déposés par des députés de tous bords politiques, ils ont été rejetés :

  • L’interdiction des « élevages-usines », c’est-à-dire des élevages concentrationnaires qui enferment une grande densité d’animaux sans leur laisser d’accès à l’extérieur ;
  • la limitation de la durée de transport à 8 heures pour les ruminants, et 4 heures pour les volailles et les lapins ;
  • l’interdiction de l’élevage en cage des lapins et des poules ;
  • l’interdiction de la castration à vif et de la coupe des queues des porcelets ;
  • l’obligation d’installer des caméras dans les abattoirs ;
  • l’obligation de garantie sur les conditions d’abattage des animaux exportés vivants ;
  • la mise en place de « responsable protection animale  » lors de transports maritimes d’animaux vivants de plus de 8 heures.

Sur un peu moins de 80 députés présents dans l’hémicycle lors du vote sur l’article 13 de la loi (concernant le bien-être animal), seuls 14 d’entre eux ont voté pour à au moins deux des amendements mentionnés ci-dessus. La LFDA tient à citer Gabriel Attal, Delphine Batho, Sébastien Chenu, Dominique Da Silva, Typhanie Degois, Eric Diard, Loïc Dombreval, Olivier Falorni, Guillaume Kasbarian, Bastien Lachaud, JeanLuc Mélenchon, Anne-Laurence Petel, Loïc Prud’homme et Laëtitia Romeira Dias. Elle les remercie pour leur courage et la juste représentation de leurs électeurs. Grâce à ces députés, le sujet du bien-être animal a pu être largement débattu lors du vote de ce projet de loi. Malheureusement, ils n’étaient pas assez nombreux pour faire adopter ces mesures indispensables pour les animaux et notre société.

Texte discuté et voté au Sénat

Le texte a ensuite été discuté et voté au Sénat à la fin du mois de juin. Les sénateurs ont conservé la plupart des mesures concernant les animaux adoptées par l’Assemblée nationale, mais ils ont supprimé l’extension de l’étiquetage de tous les modes d’élevage ainsi que l’interdiction de rénovation des élevages de poules en cage.

L’espoir était maigre que la chambre haute conserve voire aille plus loin que la chambre basse. Ainsi, nous n’avons pas été déçus… Nous tenons cependant à souligner le dépôt d’amendements similaires à ceux proposés à l’Assemblée nationale et nous remercions les quelques sénateurs qui les ont soutenus.

Une commission mixte paritaire (CMP) créée

À la suite du vote au Sénat, le texte étant substantiellement différent, une commission mixte paritaire a été créée le 4 juillet afin que les deux chambres trouvent un accord sur le projet de loi. Cette commission mixte paritaire (CMP) était composée de 14 députés et 14 sénateurs et s’est réunie début juillet. Aucun des 13 députés ayant voté en faveur des mesures visant à améliorer le bien-être des animaux n’en faisait partie. La CMP s’est soldée par un échec car les deux chambres ne sont pas tombées d’accord sur l’ensemble du projet de loi.

Le texte voté par le Sénat est retourné à l’Assemblée le 12 septembre. Aucune amélioration en faveur des animaux n’était attendue. Lors de son retour au Sénat, le projet de loi a immédiatement été rejeté. l’Assemblée nationale doit voter une dernière fois le 2 octobre pour définitivement adopter ou rejeter ce projet de loi.

Conclusion

Ce projet de loi apporte une immense déception à ceux qui se préoccupent du bien-être des animaux d’élevage. Tous les amendements en faveur des animaux que les ONG de défense des animaux ont soutenus et soumis aux députés ont été rejetés. Il semblerait que nos ministres et nos élus n’aient toujours pas compris que la majorité de Français a à cœur de voir évoluer les pratiques d’élevage pour qu’elles soient plus respectueuses du bien-être animal.

Nikita Bachelard

Article publié dans le numéro 99 de la revue Droit Animal, Éthique & Sciences.

ACTUALITÉS