Brexit: quel impact pour les animaux?

Le Brexit est un événement politique majeur, qui aura une incidence sur de très nombreux domaines politiques. Les animaux, leur bien-être et leur protection en font partie. En effet, la protection des animaux est un sujet largement régi par la législation européenne. Une sortie du Royaume-Uni de l’Union aura potentiellement des conséquences considérables et à long-terme sur la protection des animaux aux échelles nationale, communautaire et internationale. Les analyses sur ce sujet montrent que le Brexit comporte des opportunités ainsi que des menaces pour la protection animale.

Qu’est-ce que le Brexit ?
Le 1er février 2020, le Royaume-Uni est officiellement sorti de l’Union européenne (UE). Désormais, l’UE compte 27 États membres au lieu de 28, et le Parlement européen 705 eurodéputés au lieu de 751. La sortie du Royaume-Uni de l’UE est appelée « Brexit » : une contraction de Britain (Grande-Bretagne) et exit (sortie). Le Brexit a été voté par référendum le 23 juin 2016 à 51,9 % des voix. Ce référendum était une promesse de campagne du candidat conservateur David Cameron s’il remportait les élections générales en 2015 et devenait Premier ministre : une concession, pour cet europhile convaincu, accordée dans le but de mettre un terme aux tensions au sein de son propre parti politique.
Lorsque le processus de sortie du Royaume-Uni a été officiellement enclenché en 2017 par la Première ministre suivante Theresa May – David Cameron, ayant démissionné à la suite du vote –, le pays avait jusqu’au 29 mars 2019 pour trouver un accord avec l’Union sur les modalités de transition vers la sortie du pays. Ce délai paraissait relativement court compte tenu du fait que ce genre d’exercice n’a jamais été réalisé : c’est la première fois qu’un État quitte l’UE.
Le Brexit avait été reporté pour des raisons de politique intérieure : un désaccord profond sur les modalités de sortie de l’UE au sein de la classe politique anglaise, y compris au sein même de la majorité conservatrice, le parlement refusant d’approuver l’accord de sortie négocié par Theresa May. Finalement, le nouveau Premier ministre conservateur et pro-Brexit Boris Johnson a mené la première étape du processus à son terme après un 2e report de la date. L’accord de retrait qui s’applique désormais entre le Royaume-Uni et l’UE maintient globalement l’application du droit européen. Les deux parties ont maintenant jusqu’au 31 décembre 2020 pour trouver un accord. Plusieurs scénarios sont envisagés par les analystes:
• Le Royaume-Uni serait membre de l’Espace économique européen, sur le modèle de la Norvège, et continuerait donc à avoir accès au marché unique européen ;
• Le Royaume-Uni copierait le modèle de la Suisse, c’est-à-dire qu’il établirait toute une série d’accords bilatéraux avec l’UE dans de nombreux domaines, notamment l’agriculture ;
• Le Royaume-Uni et l’UE établiraient une union douanière, ce qui supprimerait les tarifs douaniers entre eux ;
• Le Royaume-Uni et l’UE établiraient un accord de libre-échange global, basé sur le modèle du CETA avec le Canada par exemple ;
• Aucun accord particulier ne serait trouvé entre l’Union et le Royaume-Uni, qui s’en remettraient aux règles du commerce international de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC).
Depuis, le début du mois de mars, les négociations entre Londres et Bruxelles ont commencé autour de ce potentiel accord. Mais la date limite fixée dans 11 mois semblait déjà difficile à tenir avant la crise sanitaire mondiale liée au coronavirus. En effet, les deux capitales ne sont pas du tout sur la même longueur d’onde : Bruxelles est partisante d’un scénario plus proche du modèle norvégien, avec une forte intégration du Royaume-Uni au marché européen, de par sa proximité géographique et son interdépendance économique avec l’UE ; Londres recherche son indépendance et Boris Johnson est plutôt favorable à un accord de libre-échange sur le modèle du CETA, ce que Bruxelles a déjà annoncé ne pas accepter. La crise du coronavirus risque d’entrainer le report de la date de fin des négociations d’un à deux ans.

La législation sur les animaux au Royaume-Uni

Le Royaume-Uni pionnier de la protection animale

En matière de protection animale, le Royaume-Uni est un pays phare (Joe MORAN in a meeting of the European Parliament Intergroup on the Welfare and Conservation of Animals, 2017). C’est le pays de grands penseurs en éthique animale (Jeremy Bentham, Charles Darwin…) et celui où les premières lois de protection des animaux ont été adoptées au XIXe siècle (le Martin’s Act de 1822 a interdit les actes de cruauté envers le bétail). De plus, le rapport Brambell a établi pour la première fois le principe des « Cinq libertés » en 1965, principe qui a ensuite été repris par le Conseil sur le bien-être des animaux d’élevage (Farm Animal Welfare Council) britannique et est maintenant reconnu internationalement par l’Organisation mondiale de la santé animale comme principes essentiels pour assurer le bien-être des animaux.

Le Royaume-Uni, contrairement à la France, impose parfois des normes plus strictes que les standards européens en matière de protection animale. Par exemple, les cages de contention pendant la maternité des truies sont interdites au Royaume-Uni, alors qu’elles sont autorisées jusqu’à quatre semaines avant la mise-bas par l’UE. Autre exemple, le Royaume-Uni requiert une litière (paille ou autre) pour tous les veaux, quel que soit leur âge, alors que l’UE requiert une litière seulement pour les veaux de 0 à 15 jours d’âge. De même, les densités maximales de peuplement pour les poulets sont légèrement inférieures au Royaume-Uni que ce que permet la législation européenne.

L’Union européenne n’est pas en reste en matière de protection animale

Nombreuses sont les problématiques liées à la protection animale qui sont traitées au niveau européen. L’UE a adopté de nombreuses directives et règlements qui traitent des animaux de rente, des animaux de laboratoires, des espèces sauvages menacées d’extinction… Certaines de ces législations, comme la directive sur la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques, sont reconnues comme les plus avancées dans le monde. En matière de protection des animaux de laboratoire, l’UE fait figure de premier de la classe. Elle travaille aussi au niveau international au sein de la coopération internationale en matière de réglementation des produits cosmétiques (International cooperation for cosmetic regulation) notamment pour trouver des alternatives aux tests sur animaux.

L’Union a également le pouvoir d’imposer des normes aux pays-tiers, en dehors de son territoire : pour l’abattage des animaux par exemple, elle exige que les animaux importés et exportés soient abattus dans des conditions qui répondent aux standards européens, qui sont en général, dans ce domaine, plus élevés que ceux des pays-tiers.

La majeure partie de la protection animale au Royaume-Uni vient de l’Union européenne

Bien que le Royaume-Uni soit globalement un pays avancé en matière de protection animale, environ 80 % de ses règles de protection animale provenaient de l’UE. C’est pour l’instant toujours le cas car le Royaume-Uni a adopté la loi de retrait de l’Union en 2018, copiant – en les adaptant – la majorité des lois européennes dans le droit national (European Union (Withdrawal) Act 2018) afin de se laisser le temps d’établir ses propres législations.

Les lois européennes concernant les animaux sont nombreuses. Les principales sont reprises dans le tableau suivant :

Tableau 1 : Principaux textes législatifs européens concernant les animaux

Catégorie d’animaux

Textes législatifs et réglementaires

Animaux d’élevage

Directive 98/58/CE du Conseil du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages

Règlement (CE) n°1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes

Règlement (CE) n°1099/2009 du Conseil du 24 septembre 2009 sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort

Directive 1999/74/CE du Conseil du 19 juillet 1999 établissant les normes minimales relatives à la protection des poules pondeuses

Directive 2007/43/CE du Conseil du 28 juin 2007 fixant des règles minimales relatives à la protection des poulets destinés à la production de viande

Directive 2008/119/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales relatives à la protection des veaux

Directive 2008/120/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales relatives à la protection des porcs

Animaux de laboratoire

Directive 2010/63/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2010 relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques

Règlement (CE) n°1907/2006 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH)

Règlement (CE) n°1223/2009 du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques

Animaux sauvages

Directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages

Directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages

Règlement (UE) n°1143/2014 du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 relatif à la prévention et à la gestion de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes

Règlement (CE) n°1007/2009 sur le commerce des produits dérivés du phoque

Animaux de compagnie

Règlement (UE) n°576/2013 du Parlement européen et du Conseil du 12 juin 2013 relatif aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie et abrogeant le règlement (CE) n°998/2003

Règlement (CE) n°1523/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2007 interdisant la mise sur le marché, l’importation dans la Communauté ou l’exportation depuis cette dernière de fourrure de chat et de chien et de produits en contenant

Concernant les animaux d’élevage, l’UE traite aussi bien des conditions d’élevage que de transport et d’abattage. Elle couvre également certaines filières d’élevage (poules, poulets, veaux, porcs) mais pas toutes. Les vaches laitières, les lapins… ne sont couverts que dans les textes généraux.

Au sujet des animaux de laboratoire, elle traite de la protection des animaux utilisés, ainsi que de l’obligation ou l’interdiction de tests sur animaux pour des tests de toxicités des produits chimiques et les cosmétiques.

Pour ce qui est des animaux sauvages, l’Union traite principalement de la protection des espèces et de leur environnement. Elle a aussi légiféré sur la vente de produits dérivés du phoque.

Enfin, pour les animaux de compagnie, l’UE se préoccupe du commerce illégal de chiens et de chats, et interdit la production, la vente et l’importation de leur fourrure.

L’UE couvre donc un nombre important de problématiques liées aux animaux. Le retrait du Royaume-Uni constitue une opportunité pour l’État britannique pour aller plus loin dans certains domaines de la protection animale. Cependant, dans de nombreuses situations, les animaux risquent plutôt de pâtir de la sortie du Royaume-Uni de l’UE.

© L214 Ethique & Animaux

Les opportunités du Brexit pour les animaux

Le Royaume-Uni pourra prendre des mesures jusque-là interdites par l’Union européenne

Certaines règles de l’UE, principalement liées au marché commun, empêche les États membres de prendre des mesures qui entraineraient une concurrence déloyale au sein du marché commun.

La politique agricole commune (PAC) existe depuis 1962 au sein de l’UE et représente 38 % du budget européen. Le Royaume-Uni était jusque-là un contributeur net au budget de la PAC, c’est-à-dire qu’il donnait plus que ce qu’il recevait en aides en retour. La PAC est énormément critiquée en Europe pour de nombreuses raisons, notamment parce que la majorité des aides financières allouées aux agriculteurs dépendent de la taille de l’exploitation, au lieu de récompenser les agriculteurs favorisant des pratiques respectueuses du bien-être animal et de l’environnement. En sortant de l’UE, le Royaume-Uni a la possibilité de revoir totalement sa politique agricole et de mettre en place des aides financières plus favorables aux agricultures vertueuses. Dans un rapport de 2018 sur le futur de l’agriculture au Royaume-Uni, le gouvernement a insisté sur la possibilité de cibler les aides financières vers les agriculteurs répondant à des normes élevées de bien-être animal. Cependant, les derniers rebondissements au sujet du projet de loi sur l’agriculture semblent laisser la question du bien-être animal de côté.

Le transport d’animaux vivants intra-européen et vers des pays-tiers est courant. Le règlement 1/2005 réglemente la protection des animaux pendant le transport mais il est mal appliqué. De nombreux animaux sont transportés dans des conditions déplorables pendant des trajets parfois extrêmement longs, pouvant durer plusieurs jours. Le Royaume-Uni exporte principalement des moutons et dans une moindre mesure des bovins. Le nombre d’animaux exportés s’élevait à 43 000 en 2016. Les États membres ne peuvent pas interdire le transport d’animaux vivants à cause du principe de libre circulation des biens qui prévaut au sein de l’Union. Le Brexit représente donc une opportunité pour le Royaume-Uni de pouvoir mettre un terme à l’exportation d’animaux vivants en dehors de l’île. Le parti conservateur avait mentionné cette hypothèse dans son manifeste de 2017. Une proposition de loi interdisant le transport d’animaux vivants avait également vu le jour cette année-là. En 2018, le gouvernement avait lancé une consultation sur le sujet et demandé une expertise au Conseil britannique sur le bien-être des animaux d’élevage. La même année, Boris Johnson, qui n’était pas encore Premier ministre, s’était exprimé contre l’exportation d’animaux vivants. Cependant, à ce stade, aucun engagement n’a été pris par le gouvernement à ce sujet.

La production, l’importation et la vente de fourrure de chiens et de chats et de peau de phoques sont interdites au sein de l’UE. Ce n’est pas le cas pour les autres espèces. Le Royaume-Uni a interdit la production de fourrure provenant d’espèces sauvages sur son territoire mais d’après le gouvernement qui répondait à une commission parlementaire sur le sujet en 2018, la libre circulation des biens au sein du marché unique de l’UE empêchait jusque-là le Royaume-Uni d’en interdire l’importation et la vente. Le gouvernement précisait alors que le Brexit représentait une opportunité pour considérer une telle interdiction. Cependant, quelques mois plus tard, le gouvernement a répondu à une pétition officielle sur le sujet qu’il préférait travailler au niveau international pour s’accorder sur des standards de bien-être animal et progressivement supprimer les méthodes d’élevage et de capture cruelles et inhumaines (sic !).

La question de l’interdiction de l’importation du foie gras au Royaume-Uni a été soulevée. Le Royaume-Uni ne produit pas de foie gras, à l’instar de la plupart des pays de l’Union, à l’exception de cinq pays dont la France. Cependant, selon le gouvernement britannique, l’importation de foie gras ne peut pas être interdite dans le pays tant qu’il fait partie de l’UE, d’après le principe de la libre circulation des biens. Le gouvernement conservateur s’est opposé à un amendement interdisant l’importation de foie gras qui avait été déposé par un parlementaire travailliste lors de l’examen du projet de loi sur l’agriculture en novembre 2018.

La loi de retrait de l’Union européenne adoptée par le parlement britannique en 2018 a abrogé la loi qui avait fait entrer le pays dans la communauté européenne en 1973 et a fait entrer tous les règlements européens dans la loi britannique. Cependant, l’article 13 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), qui reconnait les animaux comme des êtres sensibles et obligent les membres de l’UE à tenir pleinement compte des exigences en matière de santé et de bien-être des animaux lorsqu’ils formulent la politique de l’UE dans de nombreux domaines, n’a pas été transposé. Au Royaume-Uni, les animaux sont déjà reconnus comme « sentients » (voir l’article « Le mot sentience entre dans le Larousse 2020 ») mais pas les animaux sauvages, alors que l’article 13 du TFUE concerne tous les animaux. De plus, l’obligation de tenir compte du bien-être des animaux lors de la formulation des politiques publiques n’est pas inscrite dans le droit britannique. Les conservateurs ont refusé un amendement copie-conforme de l’article 13 lors de l’adoption de la loi de retrait de l’UE. En retour, le gouvernement conservateur a proposé un projet de loi à ce sujet, mais largement édulcoré par rapport à l’article 13. Finalement, le débat en est resté là.

Les mesures prises par le gouvernement britannique depuis le vote en faveur du Brexit

Peu après le référendum, le gouvernement n’a cessé de répéter que le Royaume-Uni continuerait à être un leader en matière de bien-être des animaux. Il s’est engagé sur plusieurs mesures concernant les animaux, probablement dans le but de rassembler un pays largement divisé depuis l’issue du référendum. À partir de 2018, le gouvernement a pris des mesures en ce sens.

Le gouvernement conservateur a adopté une loi rendant obligatoire les caméras de vidéo-surveillance dans tous les abattoirs anglais. Cela fait suite à de nombreux scandales révélés par des vidéos clandestines tournées dans des abattoirs dans le pays, montrant de actes de maltraitance voire de cruauté et des infractions notoires.

Le gouvernement a également interdit la vente de produits cosmétiques et de soins contenant des microbilles de plastique, qui se retrouvent dans les océans et sont nocives pour les animaux marins.

Une réglementation extrêmement stricte sur la vente d’ivoire a vu le jour après la promesse du gouvernement et l’engagement de Boris Johnson. La vente d’ivoire et de produits en contenant est devenue interdite, avec quelques exceptions très strictement encadrées. L’UE pour sa part réglemente le commerce d’ivoire strictement mais sans l’interdire.

Afin de lutter contre les fermes à chiots et chatons et l’importation de ces animaux depuis les pays de l’Est de l’Europe principalement, le gouvernement britannique a décidé d’interdire la vente des chiots et chatons de moins de 6 mois par des intermédiaires, ce qui comprend les animaleries. Dans le cas où le Royaume-Uni déciderait de prendre de réelles distances avec l’UE, il pourrait décider d’interdire totalement l’importation de chiots.

En 2019, le gouvernement britannique a décidé d’interdire la présence des animaux sauvages dans les cirques, à l’instar de la grande majorité des pays de l’UE. Cette interdiction longtemps attendue aurait pu intervenir plus tôt car l’UE n’empêche pas les États de prendre de telles mesures.

Le gouvernement a annoncé réfléchir à d’autres mesures, telles que l’interdiction de détenir des primates comme animaux de compagnie (une consultation a été lancée sur le sujet entre octobre 2019 et janvier 2020), ou encore l’interdiction de l’importation et exportation de trophées de chasse.

Les menaces du Brexit pour les animaux

© Gaurav Dhwaj Khadka / CC BY-SA

Avec l’accord de retrait en vigueur depuis le 31 janvier, les menaces pour les animaux sont limitées car le Royaume-Uni a transposé la plupart de la législation européenne dans son droit national pour se laisser le temps de décider de ses propres lois. Pourtant, les menaces pour les animaux pourraient être bien réelles dans l’avenir, si le Royaume-Uni et l’UE décident de prendre leurs distances passée la date du 31 décembre 2020. Le plus gros impact concernera les animaux d’élevage, qui sont les plus nombreux. L’impact se fera ressentir non seulement au niveau du Royaume-Uni, mais également aux niveaux communautaire et international.

Au niveau du Royaume-Uni

Plusieurs menaces pèsent sur les animaux d’élevage du côté britannique. D’abord, Boris Johnson semble favorable à un éloignement de l’UE et un rapprochement avec les États-Unis, entre autres, ce qui réjouirait le président américain Donald Trump. L’accord de libre-échange souhaité par Londres et Washington pourrait entrainer une baisse des standards britanniques en matière de protection animale. En effet, les États-Unis produisent notamment des poulets lavés au chlore. Cette pratique est associée à des mauvaises conditions d’élevage, qui ont tendance à favoriser les maladies et autres risques infectieux, dont les Américains se débarrassent en nettoyant les carcasses de poulets avec du chlore. L’importation de tels poulets est interdite au sein de l’UE. Un accord de libre-échange entre les Royaume-Uni et les États-Unis pourrait signifier le retour du poulet chloré sur le marché britannique, ce qui aurait pour conséquence de tirer les standards de production britannique vers le bas pour être compétitif. Il en va de même pour le bœuf aux hormones, dont la production et l’importation est interdite dans l’Union. De plus, sans ses voisins européens à ses côtés, le pouvoir de négociation du Royaume-Uni s’en voit largement affaibli, aussi bien dans les négociations bilatérales que multilatérales, et également au sein d’institutions internationales.

Ensuite, il y a un risque de baisse des aides financières agricoles pour les fermiers britanniques. Comme nous l’avons évoqué, les aides qu’ils reçoivent jusqu’à présent proviennent de la politique agricole commune. La perte de ces aides devra être compensée par le gouvernement. De plus, le Royaume-Uni risque de voir son économie se détériorer, comme l’ont analysé de nombreuses institutions économiques dont le Fonds monétaire international. Ainsi, les éleveurs pourraient être négativement impactés et le bien-être animal en pâtirait sûrement.

Les animaux d’élevage seraient également impactés dans le cadre du transport. En Bulgarie, à la frontière avec la Turquie, des vérifications sanitaires doivent avoir lieu pour les animaux transportés vivants en dehors de l’UE. Ces contrôles, nécessaires mais mal adaptés, entrainent des situations catastrophiques où les animaux sont retenus à la frontière pendant de longues heures, au mépris de la réglementation européenne. Sans union douanière entre le Royaume-Uni et l’UE, une situation similaire pourrait se produire à la frontière à Douvres et à Calais.

Aux niveaux européen et international

Du côté de l’Union, les animaux pourraient aussi être perdants. En effet, le Royaume-Uni ne pèsera plus de son poids dans les négociations internes en faveur du bien-être animal, alors que ce pays est historiquement moteur sur le sujet. Cela pourrait se refléter également dans les prises de positions de l’UE au sein des institutions internationales.

De plus, comme nous l’avons vu précédemment, le Royaume-Uni est un contributeur net au budget de la PAC. Celui-ci va donc être largement impacté par le retrait du Royaume-Uni de l’UE, ce qui risque d’entrainer un effet global négatif pour le secteur agroalimentaire européen. Etant donné que nombre de fermiers européens dépendent des aides financières de la PAC, leur baisse risque d’avoir un effet négatif sur le bien-être des animaux d’élevage.

En outre, le Royaume-Uni utilisait le système européen TRACES (Trade Control and Expert System), qui est un réseau vétérinaire sanitaire de certification et de notification. TRACES assure la traçabilité et le contrôle des produits d’origine animale et des animaux vivants lors de leurs mouvements et importations dans l’UE. La perte de ce système entrainera une augmentation des contrôles des animaux aux frontières, résultant en de longues attentes pour les animaux.

Une menace pèse également sur les animaux de laboratoire. Une coopération européenne porte sur les tests toxicologiques et le développement de méthodes alternatives à l’expérimentation animale, dans le but de réduire au maximum les tests sur animaux et le nombre d’animaux utilisés en évitant la duplication des tests. Si le Royaume-Uni n’a plus accès à l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) ou le centre européen de validation des méthodes alternatives (EURL-ECVAM), la coopération sera plus difficile.

Enfin, certaines problématiques font fi des frontières. C’est le cas du trafic d’espèces animales, notamment le trafic d’espèces sauvages. Une coopération à toutes les échelles est nécessaire pour lutter contre ce trafic.

Conclusion

Nous avons exposé les potentielles opportunités ainsi que les menaces afférentes à la sortie du Royaume-Uni de l’UE. Il semblerait que, de manière générale, les animaux aient plus à perdre qu’à gagner d’un Brexit. Les opportunités d’amélioration de la protection des animaux sont limitées et incertaines, d’autant plus que le parti conservateur au pouvoir au Royaume-Uni, malgré quelques engagements et mesures en faveur des animaux, n’est pas réputé pour être pro-bien-être animal, comme en témoignent notamment des promesses non tenues et des propos en faveur de l’industrie agroalimentaire et du lobby de la chasse. Wookey insiste sur la nécessité de surveiller de près les promesses et actions du gouvernement britannique dans ce domaine.

Globalement, les modalités finales de la relation entre le Royaume-Uni et l’UE détermineront l’impact réel et à long terme du Brexit sur les animaux. Dans tous les cas, l’impact sur les animaux ne concernera pas uniquement ceux présents au Royaume-Uni mais également les animaux de l’Union et à l’international.

Près de quatre ans après le référendum pour ou contre la sortie du pays de l’UE, il semble que les relations entre Bruxelles et Londres soient plus compliquées que jamais. Il faudra donc suivre de près le dénouement de cette séparation.

Nikita Bachelard


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