Le Collectif des vétérinaires pour l’abolition de la corrida salue le positionnement du Conseil de l’Ordre

L’Ordre des vétérinaires français a répondu à la demande du COVAC portant sur l’engagement de certains vétérinaires pour la corrida par la voix de son président le Dr Michel Baussier (voir l’article de Michel Baussier p. 14 de cette même revue). Il se positionne clairement contre la corrida, et invite chaque vétérinaire à s’interroger sur sa position face à la corrida, du point de vue de l’éthique personnelle comme du point de vue de la dignité de la profession.

corrida à cheval


La page du site de l’Ordre dédiée à la question de la corrida reprend les quatre étapes chronologiques qui ont abouti à la prise de position.

  • Les deux premières étapes : « Corrida : l’Ordre interpellé par le COVAC » et « La démarche de l’Ordre en matière de réflexion sur l’éthique animale ». Elles renvoient à la lettre initiale du COVAC de mai 2015 et à la réponse de l’Ordre de juin 2015 (rapportées sur notre site dans les articles « Lettre ouverte au CSOV » (1) et « Le Conseil de l’Ordre va émettre un avis sur la corrida » ).
  • Les deux étapes suivantes : « Le rapport du pôle éthique vétérinaire et animal » et « La réponse du Président de l’Ordre au COVAC ». Elles renvoient au rapport « Éthique vétérinaire et corrida » de fin 2015 et à la réponse du président Baussier d’août 2016.

Le rapport du pôle éthique vétérinaire et animal

Il comprend un intéressant chapitre introductif descriptif intitulé « La corrida ». Plus loin, le compte rendu de l’audition de l’AFVT (Association française des vétérinaires taurins) montre que cette association se retranche derrière un rôle technique et sanitaire, et estime ne pas faire la promotion de la corrida. Heureusement, il n’a pas échappé à l’Ordre que « l’AFVT décerne chaque année le prix P. Daulouède, du nom de son fondateur, à la fin de chaque saison de corrida, à toute entité ou toute personne ayant particulièrement mis en valeur le taureau de combat » (2).

La réponse du président de l’Ordre au COVAC

C’est avec une grande satisfaction que nous avons pris connaissance de la réponse du Conseil national de l’Ordre des vétérinaires à notre lettre du 24 mai 2015 l’interrogeant sur la corrida et l’engagement de certains vétérinaires dans les activités taurines.

Nous regrettons que les instances ordinales se soient vexées que le COVAC les ait interpellées publiquement. La fonction de notre collectif, grâce à la crédibilité que nous confère notre nombre d’adhérents, est de contribuer à faire bouger les choses, notamment en promouvant son point de vue auprès de l’opinion publique, des médias et des diverses instances. Notre but n’était évidemment pas de brusquer l’Ordre. En dernière analyse, nous constatons qu’il a étudié la question de façon documentée, collégiale et contradictoire, et rendu un avis éthique réfléchi.

Le Conseil national reformule notre interpellation de la manière qu’il pense adaptée, à savoir « lui demander de prendre position sur la souffrance des animaux lors de corridas en général et sur la question de la caution que les vétérinaires peuvent ou ne peuvent pas apporter à un tel spectacle ».

Il y répond par les sections I et III de la lettre, dont nous reproduisons des extraits ci-dessous :

Extraits de la section I – « La pratique de la corrida est-elle compatible avec le respect du bien-être animal ? » :

« Dans les spectacles taurins sanglants, la douleur infligée aux animaux n’est pas contestée. Dans la pratique de la corrida, c’est précisément cette douleur qui augmente les réactions défensives des animaux, leur stress psychologique et physique et donc leur agressivité. Elle conditionne ainsi le succès du spectacle. La courte durée du spectacle (20 minutes) et la sélection d’animaux agressifs et génétiquement prédisposés à combattre paraissent une atténuation peu significative de l’intensité des souffrances physiques forcément ressenties par les animaux.

Les spectacles taurins sanglants, entraînant, par des plaies profondes sciemment provoquées, des souffrances animales foncièrement évitables et conduisant à la mise à mort d’animaux tenus dans un espace clos et sans possibilité de fuite, dans le seul but d’un divertissement, ne sont aucunement compatibles avec le respect du bien-être animal. ».

Extraits de la section III « Les vétérinaires et la corrida » :

« Même s’ils n’en avaient pas pris la mesure, tous les vétérinaires vont devoir, dans le cadre du code de mars 2015, s’interroger sur leur position de vétérinaire, professionnel reconnu du bien-être animal, face à diverses activités humaines susceptibles de lui porter atteinte, la corrida constituant manifestement un des cas les plus marquants, et sur la caution que chacun d’eux, consciemment ou non, leur apporte ou ne leur apporte pas. Ils seront bien inspirés de le faire avec le sens de la juste mesure.

Ils vont devoir le faire, y compris et plus encore les vétérinaires « taurins », parce que le code de déontologie, partie intégrante du code rural et de la pêche maritime, pris par décret en Conseil d’État, leur impose de respecter l’animal mais surtout parce qu’en son article R242-48 il impose dorénavant à chaque vétérinaire tenu au respect de ce texte, lorsqu’il se trouve en présence d’un animal blessé, qui est en péril, de s’efforcer, certes dans les limites de ses possibilités et certes en présence d’une demande effective, d’atténuer la souffrance de l’animal. »

En conclusion

Nous félicitons le groupe de travail du CNOV qui a permis de formuler cet avis. Nous savons que cet avis est le fruit d’une étude rigoureuse et sincère des éléments qui lui ont été fournis, tant par le COVAC que par l’AFVT, ainsi que d’une concertation minutieuse avec les membres des Conseils régionaux.

Nous remercions chaleureusement le président Baussier pour son souci du bien-être animal. Il a su faire de cette question un axe important de son action au CNOV.

Nous rendons hommage à l’Ordre des vétérinaires français, qui représente à ce jour plus de 18 000 professionnels, de cet engagement éthique dont l’impact va toucher la France, mais également les pays environnants.

Lorsque, dans un avenir sans doute prochain, la corrida sera abolie, on se souviendra que l’Ordre des vétérinaires français avait su prendre position.

Le Collectif des vétérinaires pour l’abolition de la corrida

Article publié dans le numéro 91 de la revue Droit Animal, Éthique & Sciences 

Article publié le 21 septembre 2016 sur le site du COVAC 

  1. L’appellation «CNOV» est désormais à utiliser pour l’instance nationale du Conseil de l’Ordre des vétérinaires, avec « N » pour national, à la place de « CSOV » avec « S » pour supérieur.
  2. Ce prix P. Daulouède de l’AFVT a ainsi été attribué :
    • pour 2010, à l’Association des aficionados cérétans (ADAC), qui organise les corridas de la feria de Céret chaque année en juillet,
    • pour 2011, à l’opération « Toros de France », organisée depuis 2010 par l’Association des éleveurs français de taureaux de combat (AEFTC), qui consiste à contribuer à l’organisation de corridas afin de promouvoir les élevages de taureaux destinés à la corrida (« ganaderías ») français,
    • pour 2012, au picador Gabin Rehabi,
    • pour 2013, à la ganadería espagnole de Valdellán et à la ganadería française de Las Dos Hermanas, en référence à deux novilladas (corridas avec des taurillons) de la saison,
    • pour 2014, à la ganaderia espagnole de Pedraza de Yeltes.

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