Les espèces-clés : importance écologique de leur prise en compte

Certaines espèces ne sont pas seulement utiles à la nature, elles sont indispensables à l’équilibre des écosystèmes. On les appelle les « espèces-clés ».

Une espèce-clé, ou espèce clé de voûte, est une « espèce dont la disparition compromettrait la structure et le fonctionnement d’un écosystème ». En d’autres termes, il s’agit d’une espèce indispensable pour maintenir l’équilibre naturel d’un écosystème.

Faune-clé : une diversité biologique et des services multiples

Ces espèces peuvent se caractériser par leurs rôles écosystémiques :

  • Super-prédateurs : les super-prédateurs, tels que le loup ou le requin, ont un effet sur la régulation de l’abondance des espèces, de la biomasse ou de la productivité des communautés partageant leurs territoires. Par ailleurs, ils veillent à la bonne santé des populations en élimant les individus les plus faibles, malades, trop vieux, ou encore blessés.
  • Ingénieurs des écosystèmes : ce sont ceux qui créent ou changent leurs habitats, comme le castor. Ils permettent, ainsi, la régénération des cours d’eau, des forêts, des prairies, et autres environnements sauvages.
  • Mutualistes : lorsque deux espèces ou plus se rendent services mutuellement, elles sont appelées mutualistes. L’exemple le plus connu de mutualisme est celui de la pollinisation des plantes par les insectes comme l’abeille ou le bourdon.
  • Fournisseuses de ressources : ces espèces permettent, par leurs activités, de fournir des ressources aux autres espèces de l’écosystème, voire directement à l’environnement. Par exemple, les fourmis, par leurs récoltes, cultivent et favorisent la fertilisation des sols.

Certaines espèces-clés peuvent avoir plusieurs rôles écologiques, simultanément. Ces catégories ne sont donc pas fixées.

Une protection justifiable

Les individus faisant partie des espèces-clés ont un rôle indispensable dans le maintien de l’équilibre et la régulation de leur écosystème. En conséquence, leur disparition entraînerait des effets fortement néfastes, pour ne pas dire catastrophiques, sur l’environnement. Cela déclencherait une cascade de réactions trophiques (ensemble des relations alimentaires interspécifiques et intraspécifiques que les individus entretiennent) aux effets négatifs, pouvant se manifester de diverses formes selon l’espèce perdue. Ils vont de la mort d’une forêt, à la prolifération d’épizooties (épidémie touchant des animaux de la même espèce ou non, dans une région donnée) ou à l’apparition de famines, voire même à l’extinction des espèces dépendantes de celles disparues.

D’autre part, la protection de ces espèces est d’autant plus justifiable que l’on assiste à une perte de biodiversité d’origine anthropique en ce début de XXIe siècle. En effet, plus d’un million d’espèces sont aujourd’hui menacées à travers le monde par le changement climatique, la croissance démographique, la profusion d’espèces invasives, l’urbanisation, ou encore le braconnage, qui font peser sur la faune sauvage la menace d’une sixième extinction de masse. C’est ainsi que la pression humaine (augmentation de la déforestation et exploitation de tous les habitats sauvages) a conduit à la détérioration des écosystèmes et à la fragilisation des équilibres trophiques. Cette pression fragilise, également, les ressources à l’échelle mondiale, avec une consommation humaine supérieure à la production possible (correspondant au jour du dépassement), affectant également toute la faune sauvage.

Cas du loup gris au Yellowstone

Plusieurs exemples, tel que celui du loup gris au Yellowstone, prouvent bien que ces espèces ne peuvent être négligées dans la préservation des environnements sauvages.

La disparition, puis la réintroduction, du loup gris dans le Yellowstone est l’exemple le plus connu de l’impact d’une espèce-clé sur l’écosystème.

En effet, entre 1995 et 1997, 41 individus, provenant du Canada, furent libérés dans le parc, après une absence de 70 ans. Désormais, ce sont 60 à 100 spécimens qui y sont recensés. On observe des effets positifs sur l’ensemble de l’écosystème, comme la régulation des herbivores, la redensification de la végétation, ou encore le retour de certaines espèces disparues (castor, batraciens…).

Nécessité d’une reconnaissance

La faune-clé représente une multitude d’espèces très variées (renard, pic vert, requin mako, zooplancton, etc.). Certaines sont menacées d’extinction et, à ce titre, juridiquement protégées (Article L411-1 du Code de l’environnement). D’autres peuvent être soumises au droit de la chasse ou de la pêche, voire même classées susceptibles d’occasionner des dégâts et donc rattachées à un droit de destruction. Ces derniers régimes juridiques semblent, pourtant, être en contradiction avec le rôle essentiel que ces espèces occupent dans les écosystèmes.

Une reconnaissance juridique de l’existence, ainsi que de l’importance, de cette faune particulière garantirait, ainsi, une protection minimale aux espèces n’en bénéficiant pas.

Conclusion

En somme, la nécessité de protéger les espèces-clés devient une évidence pour la préservation de la biodiversité dans son intégralité, de par leurs fonctions pour les écosystèmes, mais également pour enrayer la tendance de perte de biodiversité causée par les crises d’origine anthropique.

Par ailleurs, il est important de se rappeler que l’homme est un maillon de cet équilibre naturel. Préserver cette faune-clé permet, ainsi, d’éviter la dégradation de ses conditions de vie et de ses ressources.

Fanny Kieffer

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